US'exit - Quitter les GAFAM et autres services numériques américains
2025-03-06 - 🕐 20mn
Mises à jour importantes
- ⚠️ OnlyOffice serait une filiale d'un société russe et le développement serait assuré à Nizhny Novgorod en Russie; CryptPad utilise une partie du code open source mais serait protégé par design de risques de sécurité
- ajout des subreddits /r/BuyFromEU et /r/degoogle comme sources d'information sur les alternatives
- clarifications et ajout d'informations pour la migration des emails
- ajout d'infomaniak en alternative complète de Google Drive
- ajout de eucloud.tech comme source d'alternatives
Plan
- Introduction
- Motivations
- Freins psychologiques et méthode, ou pourquoi faire les choses à moitié
- Où trouver des alternatives et comment en choisir ?
- Exemples d'alternatives par usage
- Bureautique et collaboration
- Cartes, navigation, street view
- Navigateur web
- Moteur de recherche
- Système d'exploitation
- Liseuses et e-books
- Assistant IA (code)
- Vrac
Introduction
Dans cet article, j'explore l'omniprésence des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) dans nos vies numériques et les alternatives européennes ou open source qui sont disponibles. Je me suis un peu plus penché sur le sujet depuis environ un an et j'ai rassemblé mes notes ici pour essayer de donner des solutions à ceux qui chercheraient à migrer vers d'autres services. C'est un travail de très longue haleine et j'ai moi-même encore des dépendances aux GAFAM, mais il faut simplement s'en occuper une par une.
Limites
- Cet article est loin d'être exhaustif et couvre ce que j'ai recherché pour mon usage personnel et ce que j'ai découvert et appris pendant sur le chemin.
- Certaines parties sont des opinions exprimées sur des manières de procéder et non des recommandations. Chaque expérience étant différente, le seul but est de partager des informations, des ressources et des idées.
Motivations
Les raisons de repenser ses utilisations des outils des GAFAM et entreprises américaines en général et de chercher des alternatives sont nombreuses et pas forcément liées, mais en voici quelques-unes:
- protection de la vie privée : les lois américaines et la puissance de ces entreprises étant ce qu'elles sont, la maîtrise de ses données personnelles est au mieux relative, au pire inexistante malgré le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données).
- lutte contre les monopoles : je vous conseille la lecture de BIG, l'excellente newsletter de Matt Stoller sur la monopolisation aux États-Unis. Elle est très américano-centrée, mais les archives d'il y a quelques années étaient très éducatives sur les mécanismes économiques et financiers en jeu et les impacts sociétaux. The Counterbalance est plus européenne mais moins prolifique. Le travail de SOMO (Pays-Bas) sur les "Big Tech" aborde aussi ces sujets. Et John Oliver présentait aussi le problème pour les Big Tech il y a bientôt 3 ans, si vous avez 25 minutes.
- dégradation des services (alias l'enshittification) : c'est lié, les monopoles ne sont jamais moteurs d'innovation et ont plutôt tendance à dégrader les services ou produits vendus (qui n'a jamais pesté contre son imprimante alors que la technologie a plusieurs décennies ?). Je recommanderais aussi la newsletter de Ed Zitron (plutôt orientée sur l'IA mais il y a des sujets Microsoft ou Google intéressants) ou la chaîne YouTube de Louis Rossman (très engagé dans le mouvement Right to Repair aux États-Unis) qui partage beaucoup de cas pratiques de ce que j'appellerais des arnaques légales. Le wiki de la Consumer Task Force récemment créé commence à recenser des exemples intéressants pour beaucoup de domaines. Il y a sûrement beaucoup d'autres exemples. Trouvez beaucoup de gens qui râlent à propos d'un produit et vous trouverez sûrement un monopole. Mais parfois ça n'est même pas visible car les alternatives sont virtuellement inexistantes et les entreprises innovantes ont été rachetées et/ou tuées dans l'œuf (les GAFAM ont racheté plus de 700 entreprises entre 2000 et 2020 selon cette étude, ou plus de 1000 en 10 ans selon SOMO, certaines clairement pour garder leur position dominante).
- ouverture des protocoles et interopérabilité des services : j'en parle plus loin concernant les emails et services de messagerie, mais en quelques mots, certains usages gagneraient à retrouver une standardisation aussi simple et générale que l'email au lieu d'avoir des services exclusifs et incompatibles; les GAFAM entretiennent leurs "jardins clos" au détriment de l'expérience utilisateur.
- conformité SSI : la politique SSI interne de votre employeur ou celle de vos clients peut mettre des contraintes sur l'hébergement et le traitement des données (incompatibles avec le CLOUD Act ou avec l'hébergement de données à l'étranger) et utiliser des outils et fournisseurs de services européens peut simplement être un argument de protection des données et même un argument commercial.
- moyens de paiement européens : en supposant que des alternatives aux moyens de paiement américains décollent (comme Wero ou les nouveaux virements instantanés gratuits peut-être ! 🇪🇺🎉), ils seront plus probablement gérés par les entreprises européennes avant les américaines qui resteraient sur les réseaux ou services de paiement classiques (MasterCard, Visa, PayPal, Stripe, ...). Et même si les frais de transactions sont réglementés en France et en Europe et bien plus faibles qu'aux États-Unis (quoique j'écrive ici, tout est pire aux États-Unis), la concurrence doit jouer.
- soutien des industries technologiques européennes (ou libres) : reporter ses abonnements ou achats de licences sur des outils européens (ou libres), c'est soutenir leur développement, renforcer l'écosystème et en fin de compte l'économie européenne (ou du logiciel libre).
- vos propres opinions et raisons personnelles ou professionnelles
- simple curiosité
- la liberté ! ✊
Freins psychologiques et méthode, ou pourquoi faire les choses à moitié
Constat
Lorsqu'on commence à regarder les logiciels et services numériques qu'on utilise au quotidien, on réalise l'omniprésence de sociétés américaines et en particulier des GAFAM dans nos vies numériques. Réfléchissez : parmi votre email, votre navigateur, votre moteur de recherche, vos logiciels de bureautique, votre système d'exploitation (ordinateur et téléphone), vos réseaux sociaux perso et pro, votre application de messagerie instantanée, votre application de conférence vidéo, vos services de streaming de vidéos et musique, votre application de cartographie et de navigation, votre application d'IA, votre liseuse et plateforme d'achat d'ebook, votre plateforme d'achat de jeux vidéo, votre magasin d'applications mobiles, votre hébergeur de code/site/contenu, combien ne sont pas américains ou pas d'un GAFAM ?
Probablement très peu, peut-être même aucun.
Vous êtes peut-être chez Spotify ou Deezer, avez une PlayStation ou une liseuse Vivlio pour emprunter vos livres à votre médiathèque locale. Si vous en avez deux de plus que ça, félicitations, vous êtes une anomalie et sur la bonne voie ! Sinon, pas de panique, il y a énormément de solutions.
Les éléphants dans la pièce...
Maintenant que vous avez vu l'éléphant et la place qu'il prend dans votre pièce de vie (numérique), il est facile de se dire que se libérer des GAFAM est simplement impossible en pratique. Ne serait-ce que parce que nous avons pour beaucoup trois pachydermes encombrants : le nôtre bien personnel, celui du boulot et celui qu'on partage par association dans tous nos échanges numériques. Si on peut faire des choix pour soi, difficile de faire migrer tout le monde, même simplement son employeur où les choses sont pourtant cadrées et communes à l'équipe ou l'organisation.
En plus de ça, les GAFAM sont à la fois rassurants et coercitifs dans le sens où ils donnent une impression d'intemporalité ("gmail existera toujours, peut-être pas un autre email") et de nécessité ("tout le monde a Word et Excel et m'envoie des fichiers de ces formats").
... et comment leur montrer la sortie
Le plus simple est de commencer par vos propres logiciels et services puisque le seul obstacle est le temps de recherche et de transition. Mieux vaut traiter un sujet à la fois et s'habituer à son utilisation au quotidien. Les habitudes prennent un certain temps à s'ancrer, faites l'effort quand vous avez un peu de temps libre. Quelques exemples les plus faciles à changer : le navigateur, le moteur de recherche, les cartes, les outils bureautiques en local, la boîte email (avec un bémol, voir le paragraphe consacré). Si vous voulez avoir plus d'impact, migrez d'abord les services que vous payez.
Ensuite, motiver des collègues pour initier quelques transitions peut prendre un peu plus de temps et être limité à quelques cas d'usages simples mais a l'avantage de sensibiliser plus de monde et tisser un début de toile libérée.
Enfin, pour tout ce qui est interaction avec d'autres, il faudra peut-être accepter deux canaux de communications : un "libéré" avec ceux qui seraient aussi sortis des GAFAM et l'ancien qui survivra tant qu'il faudra.
Dans tous les cas, vous ne pourrez probablement pas vous débarrasser de tous les GAFAM ou alors pas sans y passer beaucoup de temps. C'est pas grave. J'ai commencé à quitter Google il y a un peu plus d'un an (Android, navigateur, moteur de recherche, maps, Waze et email) mais je n'ai vraiment migré le plus de mail reçu possible vers ma nouvelle adresse que ces dernières semaines. Et je ne peux pas encore supprimer mon compte Google parce qu'il faut que j'en sorte mes archives et que j'y partage encore des documents de travail (ma suite bureautique est le gros morceau suivant).
Bref, faire les choses à moitié c'est déjà pas mal de travail.
Où trouver des alternatives et comment en choisir ?
Si vous cherchez des alternatives à un service ou logiciel particulier, une recherche sur votre moteur de recherche habituel vous retournera beaucoup de résultats. Mais voici tout de même quelques sources parmi tant d'autres regroupant des alternatives par thèmes :
- european-alternatives.eu : un projet d'un développeur freelance autrichien qui référence des alternatives européennes,
- eucloud.tech : liste des alternatives pour des solutions cloud,
- switching.software : permet de trouver des alternatives par GAFAM ou service,
- opensourcealternative.to : un répertoire d'alternatives open source,
- Les logiciels Framasoft (association loi 1901 française 🇫🇷) hébergés chez Hetzner (Allemagne 🇩🇪) et les alternatives aux services qu'ils ne proposent plus,
- La suite numérique publique (France 🇫🇷) pour les agents publics,
- Awesome-Selfhosted pour les personnes les plus techniques, mais certaines solutions auto-hébergeables sont parfois accessibles via des offres commerciales,
- subreddits /r/BuyFromEU et /r/degoogle : communautés reddit dédiées aux alternatives européennes (plus large que les GAFAM mais cela en fait partie) et alternatives aux services Google.
Dans la section suivante, je liste quelques alternatives que j'utilise ou ai notées de côté pour moi-même quand j'aurai le temps de m'en occuper. Les critères de sélection des alternatives sont les suivants, sans être exhaustifs ni très ordonnés :
- de préférence européenne,
- plutôt open source mais sans éliminer les closed source européennes ou non-GAFAM,
- avec chiffrement et/ou protection (non utilisation commerciale) des données personnelles et stockées,
- de préférence hébergée en Europe et pas chez un GAFAM (AWS, Azure, Google cloud, ...) quand j'ai cherché et trouvé l'information.
Exemples d'alternatives par usage
Bureautique et collaboration
Il y a plusieurs alternatives très crédibles aux Microsoft Office et Google Docs :
- Libre Office : pour un usage bureau (local) uniquement, mais le projet est maintenu, en développement continu et assez répandu; open source.
- Infomaniak (Suisse 🇨🇭) :
- offre cloud assez complète (avec niveau gratuit intéressant) : gestion documents, email, calendrier, visio-conférence,
- suite bureautique classique basée sur OnlyOffice,
- synchronisation avec des dossier en local sur bureau et mobile,
- permet le partage et la collaboration à plusieurs en simultané.
- Cryptpad (France 🇫🇷) :
- en ligne dans le navigateur uniquement,
- inclut beaucoup d'outils : tableur, texte, présentation, dessin, diagramme, kanban, formulaire, éditeur markdown,
- permet l'ajout et le partage de fichiers,
- données chiffrées,
- permet le partage et la collaboration à plusieurs en simultané,
- open source et auto-hébergement possible,
- voici un bon article qui passe en revue l'offre proposée.
- CollaboraOnline (Royaume-Uni 🇬🇧) :
- basé sur Libre Office et représenterait le plus gros contributeur au code source de Libre Office,
- inclut des outils bureau et en ligne (par navigateurs et applications mobiles) pour une suite bureautique de base : documents, tableurs, présentations et dessins,
- open source et auto-hébergement possible,
- intégré dans de très nombreuses offres de services cloud de partenaires et de nombreux autres outils, dont de nombreux européens,
- mais il est difficile de trouver un fournisseur avec un parcours utilisateur/client simple
Only Office(Lettonie 🇱🇻 / Russie 🇷🇺 ?) :- ⚠️ OnlyOffice serait une filiale d'un société russe et le développement serait assuré à Nizhny Novgorod en Russie; sa structure capitalistique a changé en 2023 pour devenir une filiale d'une holding enregistrée à Singapour, mais elle était précédemment une filiale d'une société russe; je les laisse dans la liste pour information;
- propose des versions bureau et en ligne (la version bureau permet aussi d'ouvrir les fichiers distants),
- permet le partage de documents et la collaboration à plusieurs en simultané sur un document, même entre clients bureau et navigateur (démonstration),
- a une offre de services bureautiques uniquement et une autre plus large de gestion de projet ou d'équipe (mail, calendrier, kanban, CRM, ...),
- open source et auto-hébergement possible.
SMTP : de l'utilité des normes et standards
Un point intéressant sur les emails est que le protocole SMTP qui régie leurs échanges a été standardisé dès 1982, donc bien avant l'avènement de l'ère des GAFAM. Beaucoup de protocoles qui restent aujourd'hui les fondements d'internet ont été conçus à cette époque dans une logique d'ouverture et d'interopérabilité. Ainsi, l'envoi d'un email est aussi simple que l'envoi d'un courrier physique : on ne se préoccupe pas de savoir chez qui le destinataire héberge ses emails et quel client il utilise. C'est complètement transparent et évident.
Ce n'est pourtant pas le cas pour d'autres usages pourtant aussi simples comme les applications de messagerie. Les SMS sont aussi compatibles que les emails, mais pas Whats'app (de Meta, alias Facebook), pas Facebook Messenger, pas iMessages (Apple)...
Imaginez un peu devoir utiliser des services postaux différents selon la destination, avoir un abonnement téléphonique par opérateur pour pouvoir communiquer avec tout le monde, avoir une adresse email par service de mail ou avoir une application par canal ou groupe de discussion (oups). C'est absurde mais c'est bien du même niveau. Les GAFAM font consciemment ce choix.
Merci SMTP ! 🥰
Fournisseur de service ou domaine personnalisé ?
Lors de la création d'une nouvelle adresse email, deux choix s'offrent à vous :
- créer un compte chez un fournisseur de service mail gratuit ou payant (laposte.net 🇫🇷, tuta mail 🇩🇪, proton mail 🇨🇭, lilo 🇫🇷, beaucoup d'autres 🇪🇺) : cela revient à remplacer un mail en @gmail.com par un autre en @tuta.com, @protonmail.com, @lilo.org, ...
- ou créer votre nom de domaine personnalisé et choisir où héberger vos emails ensuite (possible aussi parmi les solutions citées juste avant).
Créer son domaine permet de s'affranchir de la destinée de l'hébergeur mail, même si les plus courants ont probablement une durée de vie aussi longue que Gmail. Ainsi vous serez libres de migrer entre hébergeurs à volonté en gardant la même adresse email ! Vous pouvez même auto-héberger votre serveur mail si vous en avez les compétences, mais j'éviterais pour ne pas risquer d'être blacklisté par d'autres serveurs et ne pas recevoir ou pouvoir envoyer certains emails.
En revanche, cela nécessite d'acheter et renouveler son nom de domaine régulièrement (cherchez-en chez Gandi ou d'autres registrars pour vous faire une idée du prix) et mettre en place les enregistrements DNS nécessaires. Il y a toujours des explications des manipulations à faire pour cela (tuta, protonmail) mais c'est un peu plus de travail et de contexte à connaître.
Choisir un client mail
Ensuite, il faut choisir comment accéder à ses emails en évitant de devoir les gérer à trop d'endroits différents. Chaque fournisseur aura probablement au moins une interface pour navigateur pour gérer ses emails comme dans gmail. Mais vous pourrez souvent aussi utiliser un client bureau et une véritable application mobile si vous le souhaitez.
Tuta Mail contraint à utiliser leur client (bureau ou application mobile) en dehors du navigateur car leur chiffrement complet de bout en bout les rends incompatibles avec IMAP.
Proton Mail a un moyen détourné (Proton Mail Bridge) de connecter un autre client à des comptes proton mail.
Mais d'une manière générale, les serveurs et clients mails (bureau ou application mobile) sont compatibles grâce aux protocoles IMAP et POP (par exemple pour lilo.org). Cela permet d'utiliser un seul client qui centralise tous les comptes. Il y a beaucoup de clients mail pas très connus, mais le plus évident reste Thunderbird développé par Mozilla et disponible en application bureau et mobile.
Migrer
Enfin, il faut s'atteler à modifier un par un ses comptes sur toutes les plateformes et services en ligne pour changer l'adresse email pour la nouvelle. C'est très facile mais aussi très long. Commencez par les plus évidents et prenez 2 minutes si vous pouvez quand vous recevez un message sur l'ancienne adresse pour mettre à jour le compte en question.
Si vous avez un gestionnaire de mot de passe, vous pouvez chercher vos comptes sur l'ancienne adresse et en profiter pour en supprimer. C'est l'occasion d'invoquer le RGPD et de faire valoir vos droits pour demander la suppression de vos données personnelles chez les services quittés au passage. Ça m'a permis de nettoyer mes donnés chez quelques anciens fournisseur d'énergie/internet/téléphone/..., sur ma centaine de comptes à migrer.
Le temps de la migration, vous pouvez mettre en place une redirection de votre ancien mail vers votre nouveau pour y remédier et tout recevoir à un seul endroit (par exemple pour Gmail).
Et si vous le désirez, vous pouvez ensuite transférer vos archives d'emails et vos contacts en les exportant de votre ancien compte (par exemple pour GMail) et en les important dans le nouveau si la fonctionnalité y existe (vérifiez avant si cela est possible dans le niveau d'abonnement visé).
Cartes, navigation, street view
Remplacer les GAFAM veut aussi dire remplacer Google Maps, Google Street View, Apple Maps et Waze (rachetée par Google en 2013 et maintenant complètement intégré aux autres équipes de Google). Ces services sont gratuits et se rémunèrent par de la publicité, ce qui impacte la présentation des éléments sur les cartes et les résultats des recherches. Donc choisir une alternative se traduira par faire les mêmes concessions ou utiliser un service qui utilise le contenu commun d'OpenStreetMap. Cet article du blog de cartes.app présente mieux le sujet.
Dans les alternatives les plus intéressantes, je listerais :
- cartes.app (France 🇫🇷) : open source, utilise les données OpenStreetMap, met en avant les données de transports en commun (en choisissant le fond de carte "Transports"), intègre les photos de rue de panoramax, permet d'afficher des éléments par catégories assez précises;
- panoramax.fr (France 🇫🇷) : une initiative pour créer une base de données ouverte équivalente à Google Street View, alimentée par des contributions comme OpenStreetMap;
- Organic Maps (enregistrée en Estonie 🇪🇪) : open source, une très bonne application mobile qui permet de télécharger des régions entières pour consulter les cartes hors ligne (pensée pour la randonnée à l'origine);
- Mappy (France 🇫🇷) : plus axée navigation, rémunérée par des partenariats avec des marques (mises en avant dans les filtres et résultats de recherche notamment), a une très bonne vue de rue 360° mais dans certaines villes seulement;
- ViaMichelin (France 🇫🇷) : plutôt pour la navigation en voiture, inclu des publicités sur les cartes aussi,
- il y en a d'autres 🇪🇺
Navigateur web
Saviez-vous que pratiquement tous les navigateurs actuels étaient dérivés de Chromium ? Cela dit certains sont très orientés vers la protection des données et de la vie privée et détachés de Google au delà du projet Chromium de base.
En dehors de ceux-ci, Mozilla Firefox est le seul projet indépendant au niveau du code. Mais Mozilla reçoit des centaines de millions de dollars de Google pour mettre Google en moteur de recherche par défaut. Et ils ont récemment remanié leurs conditions d'utilisation probablement pour revendre eux aussi des données de navigation. Si vous préférez Firefox mais tenez à ne pas transmettre de données, LibreWolf est un fork (un dérivé du code source) qui ne remonte pas de télémétrie vers Mozilla.
Moteur de recherche
Un peu comme pour les navigateurs, Google domine très largement avec son moteur de recherche. Bing suit très très loin derrière. Les russes et les chinois ont des alternatives nationales (il faut dire que la Chine a fermé son marché numérique très tôt et a des équivalents nationaux à tous ces sujets).
Il y a ensuite des moteurs de recherche assez niche qui mettent en avant une particularité comme la protection contre le tracking (DuckDuckGo, Qwant, StartPage, Brave) ou des recherches "vertes" (Ecosia, Lilo). Seulement, ils sont pratiquement tous dépendant de l'index des pages web de Google ou Bing et se résument à une façade devant les GAFAM.
J'ai trouvé très peu de moteurs de recherche qui utilisent leur propre index :
- Kagi (USA 🇺🇸) : payant pour ne pas servir de publicité
- Mojeek (Royaume-Uni 🇬🇧) : construisent leur propre index petit à petit (8 milliards de pages indexées), mais il faut paramétrer l'utilisation d'autres moteurs de recherche et les résultats ne sont pas à la hauteur des autres.
- Qwant et Ecosia ont annoncé commencer à travailler sur un index européen; il faudra surveiller son avancée et sa qualité.
Mais faire une toute petite différence dans la sur-domination de Google et leur revenu publicitaire galactique est déjà bon à prendre pour essayer de ré-équilibrer le jeu. Pour vous donner un ordre d'idée, le procès contre Google Search qui s'est déroulé aux États-Unis en 2023 a mis en évidence que Google payait plus de 20 MILLIARDS de dollars à Apple TOUS LES ANS (36% des revenus publicitaires liés au partenariat) simplement pour être défini comme moteur de recherche par défaut chez Apple (ce qui a incité Apple à stopper le développement de son propre moteur de recherche par ailleurs).
Système d'exploitation
Linux
Pour les ordinateurs, c'est très vite vu : quitter Windows et iOS, c'est choisir une distribution Linux avec la difficulté de l'installation pour le grand public comme elles ne sont quasiment pas distribuées dans le commerce (et c'est très dommage). Je ne développerai pas plus que ça, il y a plein de ressources assez riches pour ça ailleurs.
Android
Concernant les smartphones, c'est peut-être pire : iOS ou Android à première vue (je vous laisse constater les parts de marché) et l'écrasante majorité la quasi-totalité des Android en circulation sont une version qui dépend de Google et l'alimente en données. Et par-dessus ça, les fabricants de smartphone font des modifications propres mais n'offrent pas un support et des mises à jour très longtemps. Mon Wiko précédent avait 5 ans et aucun problème matériel mais ne recevait plus de mises à jour depuis au moins deux ans, et les applications devenaient de moins en moins rétro-compatibles. Vous avez dit obsolescence programmée ?
La seule alternative valable que je connaisse est d'utiliser une version dérivée d'AOSP (Android Open Source Project, le projet à la base de tous les Android) "nettoyée" de Google le plus possible. On peut citer LineageOS (mais qui utilise encore au moins Google Play) ou /e/OS (version française 🇫🇷 dérivée de LineageOS, complètement indépendante des services Google) mais il y a une palanquée de distributions Android.
Comme pour Linux, on ne sait pas où donner de la tête sans un minimum de connaissances et l'installation est encore un peu plus compliquée. Le plus simple est sans doute de se procurer un appareil pré-équipé d'un de ces système comme les téléphones de Murena ou bien de se faire aider à une flash-party où quelqu'un l'installe pour vous sur votre téléphone. J'en utilise un depuis plus d'un an maintenant et en suis très satisfait. J'ai bien l'intention de le faire durer 10 ans ou plus celui-là !
Liseuses et e-books
Les liseuses Kindle sont très intégrées avec Amazon et ne permettent pas de lire des e-books avec DRM (Digital Rights Management, un verrou numérique pour contrôler les droits d'accès) achetés ailleurs que sur Amazon. Mais il y a beaucoup d'autres fabricants de liseuses comme Vivlio (France 🇫🇷) ou les Kobo de Rakuten (Japon 🇯🇵).
Et pour les e-books, si ce n'est pas Amazon ils auront probablement des DRM gérés par Adobe (qu'ils soient achetés ou empruntés). C'est un autre sujet à part entière, mais si vous voulez éviter Adobe, il faut chercher des livres dans un format ouvert (epub, PDF) et sans DRM. C'est parfois possible directement chez l'éditeur ou chez quelques distribeurs.
Assistant IA (programmation)
SI vous êtes développeur et que vous utilisez un assistant IA pour coder, Mistral (France 🇫🇷) a produit Codestral : un modèle dédié au développement informatique qu'ils mettent à jour régulièrement. Il faut encore que je l'essaye en remplacement de GitHub Copilot au lieu de renouveler. Le modèle est utilisable dans plusieurs IDE grâce à des plugins tiers, notamment :
- la suite JetBrains : intégration avec le plugin continue.dev
- VSCode : intégration avec les plugins continue.dev (plugin sur la marketplace) ou tabnine
- Jupyter Lab : intégration avec jupyter-ai et en spécifiant Mistral en fournisseur
Vrac
- Amazon : chercher les sites des vendeurs directement ou utiliser d'autres plateformes.
- Messageries : le protocole Matrix gérée par la fondation Matrix permet de créer des applications de messagerie interopérables et d'utiliser le client de son choix pour interagir avec d'autres utilisateurs du protocole; je manque encore de recul sur le sujet.
- Streaming films et séries : Mubi (Royaume-Uni 🇬🇧), services de chaînes TV (arte.tv, Canal+, M6, ...).
- Streaming musique : Qobuz (France 🇫🇷, investisseurs français et canadiens), Deezer (France 🇫🇷, 36% du capital aux USA, le reste surtout en France et au Luxembourg), Spotify (Suède 🇸🇪, 25% aux co-fondateurs, de multiples fonds américains et britanniques ont quelques pourcents), SoundCloud (Allemagne 🇩🇪).
- YouTube : pas d'équivalent mais PeerTube (de Framasoft 🇫🇷 et qui utilise le protocole ActivityPub) est intéressant, il permet notamment de synchroniser des vidéos publiées sur d'autres plateformes sur son compte (YouTube, Dailymotion, Vimeo).
- X/Twitter : Mastodon (Allemagne 🇩🇪, fédération d'instances avec le protocole ActivityPub), BlueSky (USA, fédération inaboutie, mais non GAFAM).
- Hébergement et services cloud : OVH cloud (France 🇫🇷), Scaleway (France 🇫🇷), Hetzner (Allemagne 🇩🇪), beaucoup d'autres 🇪🇺.
- Jeux vidéos : gog.com (Pologne 🇵🇱) pour vraiment acheter des jeux (sans DRM comme steam et d'autres plateformes).
Pour d'autres alternatives sur ces thèmes et tous les autres, je vous renvoie aux sources de références d'alternatives plus haut dans l'article.
Plus de 24 000 mots pour égratigner la surface du sujet. Mais ça doit être utile si vous avez lu jusque-là. Bon courage !